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Belle mère et alors ?
7 mars 2023

Immersion au Maroc

7-1

En attendant de pouvoir reprendre l’avion j’ai mon esprit en manque d’évasion qui se remémore les différents pays visités… Et je me rends compte que certaines choses finissent par s’estomper. Alors avant que tout ne disparaisse j’ai décidé de leur laisser une petite trace écrite…
Et mon premier voyage, hors de France et sans adultes responsables fut au Maroc avec ma meilleure amie. On avait quoi ? 20 ans ?!

Et nous voilà dans un avion de « Royal Air Maroc Bijour ! Ne faites pas attention à la moquette sur la paroi de l’avion et attachez bien votre ceinture ça va secouer ! »

On avait pris ces voyages » billets + hôtel compris » avec le petit circuit touristique qui va bien. Hors de question pour nous de le suivre à la lettre. Nous avions décidé de faire les choses par nous-mêmes et de partir à l’aventure ! Et quelle aventure !

Nous sommes arrivées de nuit et avons mis un temps interminable pour atteindre la chambre de notre hôtel. Et malgré la fatigue je n’ai pas pu tenir plus longtemps que 8h le lendemain matin ; en vrai il était 7 heures, je n’avais pas tenu compte du décalage (j’ai précisé que c’était notre premier voyage ?) au plus grand désespoir d’Harmony qui n’avait pas pour habitude de se lever si tôt. Impossible pour moi de contenir mon excitation plus longtemps, j’ouvre les rideaux et inonde la chambre de lumière, piscine turquoise, bon en vrai bleu, bleu vert gris… 3 étoiles l’hôtel mais pas plus lol

« Debouuuuuuuuutttt ! On est au Maroc meuf !!!! »

Et nous voilà donc à peine levées en plein milieu de la place Jema el-Fna noyées dans cette foule vivante, grouillante, perdues au milieu des charmeurs de serpents jouant de leurs instruments, des calèches, des roulottes de vendeurs d’oranges énormes aux couleurs vives, pressées sur le pouce pour te servir un jus bien frais, ou de fruits secs, débordants de leurs paniers ; des dresseurs de singes et diseuses de bonnes aventures couvertes de henné, et ornées de leurs parures dorées.

Nous voilà entourées d’enfants courant partout et nous glissant des « Babouches climatisées ! parfait pour toi !» par ci, « babouche climatisée ! viens voir ! » par-là.

Les couleurs sont magnifiques, le soleil recouvre toute la place de couleur ocre, l’appel à la prière retentit en haut du minaret, on ne sait plus où donner de la tête, les yeux émerveillés par cette ambiance si particulière, envoutées par cette place bouleversante, étonnante, excessive, véritable cœur battant de Marrakech.

« Les Gazelles ! UN Zemmerdeur pour ‘barrasser les Zemmerdeurs ! DEUX Zeurooooos ! » On est mortes de rire.

« Amandine ? Justine ? Marie ? La gazelle ?! la gazelle ?!» Promis, si tu arrives à trouver nos deux prénoms, je te jure on vient avec toi 🙂

Il est peut-être tôt mais regarde tout ce qui vit déjà si fort, si vite ici !

On entre dans le souk et on se rend compte que tout ceci n’était en fait qu’une esquisse, on est happées par une multitude de couleurs, d’odeurs et de sons.

On est époustouflées, éblouies, en apnée dans ce labyrinthe d’épices aux couleurs intenses présentées en pyramides, véritable trésor du Maghreb, de fruits et de pâtisseries orientales toutes plus appétissantes les unes que les autres, quelle minutie pour chacune d’entre elles, de mille et unes babouches toutes plus brillantes et décorées les unes que les autres…

On s’égare d’allée en allée et nous perdons la notion du temps et de l’espace. Et à vrai dire cela n’avait plus aucune importance.

« -Française ? Bretonne ? Bonjour mesdemoiselles. Vous venez d’où ? 

– Saint Malo. 

– Ahhh le grand Bé ! Chateaubriand, et Victor-Hugo et les remparts d’Intra-Muros ! » 

Je dois avouer que là il nous a interpelées… 

Entre temps il fait la même chose en espagnol. 

« – Hola Qué tal ? Dondé estas ? Madrid ? Ahh blablablabla » charabia espagnol qui j’imagine parlait de détails de cette ville.

Et Italien… « – Ciao, da dove vieni? Ah…. Blablablabla »

Il parle combien de langues en fait ?!

Abdelaziz tout petit, devant son stand de plantes médicinales, de cosmétiques et de pigments de peinture, qui nous ouvre les pots et nous les glisse sous le nez sans qu’on ait le temps de dire ouf.

« Ça c’est le musc! ça renforce le nafss, c’est-à-dire ton âme et te donne de la force, ça renforce tes organes les plus profonds du corps.

Ça? Sens comme ça sent bon…C’est de l’hibiscus, c’est bon si jamais tu tousses.

Ça? c’est l’eau de rose, pour les rides ! Bon mais pas pour toi ! ou sinon les cicatrices ! 

Ça c’est la fève ! C’est bon pour la mémoire. Comme ça tu m’oublies jamais ! Et c’est comme ça que moi je retiens tout !»

Un défilé d’odeurs et de couleurs, un défilé de connaissances aussi. Je dois l’avouer, on a été impressionnées.

On poursuit notre chemin, traverse la place des épices, le souk des babouches, nous retrouvons le souk des forgerons ; traversons celui des tapis et des paniers !

Autant de décors improbables à chaque coin de ruelle dans lesquelles on se perd pour notre plus grand plaisir.

On décide faire une pause dans un petit restaurant à ciel ouvert, aéré, lumineux, avec ses mosaïques blanches et vertes, sa fontaine et son cliquetis rafraichissant, ses tables abritées sous des oliviers et orangers; oasis improbable en plein cœur du souk…

On savoure nos plats autant que l’instant quand on voit apparaitre, Abdelaziz avec un ami, « Hassan ».Comment ont-ils réussi à nous retrouver alors que nous même ignorions où nous étions ?

Nous faisons connaissance et apprenons que son ami, travaille dans le tourisme : il gère un Ryad plus exactement.

Il ne travaille pas en ce moment car le Ryad n’est pas loué cette semaine. Ce qui n’est en revanche pas le cas d’Abdelaziz qui lui doit retourner travailler mais nous conseille avant de partir, d’aller goûter le thé à la menthe sur la terrasse en hauteur du « Café de France », véritable institution locale, et depuis laquelle le coucher de soleil serait magnifique.

« – Ok pourquoi pas… On ne sait pas où c’est en revanche.

– On vous retrouvera, vous inquiétez pas !

– D’accord… » Un peu étrange mais pourquoi pas.

On continue notre immersion en plein brouhaha, enchantées, découvrons le souk des lampes d’Aladin, des tenues de princesse, des plateaux de thé en or qui brillent, lol.

18 h pile les deux comparses refont surface sortant de nulle part, parés pour nous guider en direction de la terrasse du Café de France.

La vue y est effectivement magnifique et les couleurs ocres du soleil tombant laissent place à un violet hypnotisant, à cela s’ajoute le chant de l’appel à la prière toujours autant saisissant…

Et dire qu’hier, à la même heure, nous étions dans notre maison du parking de Leader Price du quartier de la gare de Saint Malo…

Le Ryad

Je ne saurais même plus vous dire de quelle manière ils nous ont fait la proposition, ni même si nous y avons réfléchi, tout ce dont je me rappelle c’est de nous quatre marchant dans les petites ruelles de la médina pour rejoindre le Ryad d’Hassan.

Je me souviens de cet instant de doute (ah quand même !) qui m’a envahi (un peu tard je l’avoue) lorsque la nuit a fini par tomber complètement et que nous n’avions absolument aucune idée de l’endroit où nous étions, ni de celui où nous allions.

Je me souviens de ces ruelles étroites qui n’en finissaient pas, de ses multitudes d’intersections identiques, puis finalement de cette porte en bois immense, qui s’est ouverte de l’intérieur…

Et de cette femme passant sa tête pour nous accueillir un immense sourire aux lèvres… « Salam Aleykoum !  Les filles je vous présente Malika, qui tient le Ryad avec moi. Mais du coup elle ne travaille pas cette semaine non plus. »

Et qui en un sourire a fait disparaitre toutes nos inquiétudes naissantes.

Le Ryad est magnifique.

Cette conception avec le patio à ciel ouvert une vraie découverte pour nous, les chambres sont parfaites, le salon marocain accueillant…

« Vous êtes ici chez vous les filles ! » Improbable cette journée…

On a quand même décidé de rentrer à l’hôtel. Mais le rendez-vous était pris pour un couscous demain soir avec Malika… Pas de lieux ni d’endroit précis, comme d’habitude, mais à peine posées en terrasse sur la place Jema El Fna, pour un café (et dieu qu’il réveille celui-là !), que nos deux amis nous ont trouvées (on a réalisé des jours plus tard que tout le monde connaissait tout le monde et que le bruit circulant de telle personne vue à tel endroit circulait plus vite qu’un appel téléphonique !)

Nous voilà parties pour une seconde journée de découverte, visite du palais de Bahia, des carreleurs de mosaïque, et des tisseurs de tapis, un arrêt dans un bouiboui typique mais visiblement réputé au souk, sans table, simplement des tabourets en bord de passage de la foule et sans toilettes non plus…

Ce qui m’a valu de découvrir les toilettes publiques marocaines, pour une pause pipi inoubliable, où tu dois prendre un petit seau à l’entrée… J’avoue ne pas avoir compris pourquoi de suite… J’ai suivi la queue devant moi avec mon petit seau, pour aller le remplir d’eau qui se trouvait dans une sorte d’abreuvoir… M’enfermer dans les toilettes, qui en fait sont turques lol !!! Et comprendre qu’il n’y a pas de papier…

Et fin d’après-midi retour promis au Ryad pour une préparation de couscous à même le sol, une dégustation des boulettes de semoule (bouillante ! et c’est un détail à ne pas négliger quand on se lance lol) à même la main…

Ya eu des loupés, des cloques, des fous-rires, du raï à fond, sans oublier les narguilés et thé à la menthe servi plus haut que mon mètre 55, une soirée passée sur le toit terrasse à observer les étoiles.

On est venues ce soir-là et on n’est jamais reparties ! On a élu domicile dans la chambre rose au lit baldaquin…

Et on a passé 10 jours avec Malika qui, bien qu’en congé avait décidé de rester avec nous pendant ce séjour, ce qui, il faut quand même le reconnaitre, a été l’élément déclencheur de notre squattage.

Journée fille

Elle nous avait d’ailleurs prévues une journée filles le lendemain ! Au programme visite du palais de Dar SI Said, le cousin du roi (et franchement ça va lool), endroit paisible en plein cœur de la médina, avec des orangers, des fontaines, des plafonds entiers de mosaïque, des portes majestueuses…

Et ensuite Hammam ! Le vrai pas celui des touristes à 80 euros, non le sien allait nous couter presque rien et elle n’en était pas peu fière !

« – Après sieste les filles pendant que je m’occupe de votre repas !

– Quoi mais il en est hors de question Malika ! Déjà de UN je ne dors jamais quand il se passe des choses autour de moi, mon subconscient doté d’une curiosité presque mal placée m’en empêche catégoriquement, alors là comment te dire que ça ne va pas être possible du tout ! Et puis de DEUX on va faire à manger ensemble ! Hors de question que tu nous prépares quelque chose sans qu’on t’aide !

-Mais oui mais oui… Allez venez les filles on en reparle après… »

Nous voilà donc à l’entrée du hammam, prêtes à passer un moment de détente, entre filles, so girly, on va pouvoir se détendre et commérer, dans un décor de princesse de mille et une nuit, un bain de pétales de roses, dans une ambiance tamisée par des bougies ou des lampes d’Aladin, le kif absolu !

Pas du tout ! On s’est retrouvées dans une gigantesque pièce sombre, aux murs et sol bruts, on aurait presque dit une grotte ! Enorme, sans fin, remplie de centaine de femmes…nues !

Et je ne m’attendais pas à ça… N’ayant pas vu une seule tête féminine sans voile depuis notre arrivée, je suis en une seconde confrontée à des centaines de chevelures, de poitrines, de ventres, de cuisses, de poils pubiens, des centaines de chairs, souvent bien en forme, parfois très vieilles, d’autres encore enfantines, une mixité improbable de féminité en tout genre.

Je me suis retrouvée en arrêt le temps d’un instant, je n’osais rien regarder, ni baisser les yeux pour ne pas montrer que j’étais gênée, alors même que j’étais à l’apogée du malaise, je cherchais un point à fixer pour m’enfuir et chacun de ces points étaient nus…

Et par-dessus tout, malgré la pénombre, je sentais des centaines de paires d’yeux fixées sur nous avec nos corps presque phosphorescents et nos maillots de bain rose bonbon et turquoise !

Malika allonge son espèce de petit tapis en mousse au sol humide, me dit d’enlever mon haut de maillot et de venir m’allonger. Et sans comprendre ce qui m’arrive, un peu, beaucoup, stupéfaite surement, je m’exécute… Adieu pudeur !

Elle m’agrippe le bras, le tend au-dessus de ma tête et frotte de toutes ses forces avec son gant « rappant », depuis le bout de mon index jusqu’au bout de mon petit orteil…. Elle me décape littéralement! Change de côté et exécute la même « torture ».

Elle amasse une boule de « truc » noir et le jette par terre.

Oh My God !! Est-ce ma saleté ? Ma peau ?! Est-ce que tout le monde jette sa peau par terre ?! Y avait-il quelqu’un avant nous ? Suis-je allongée sur un amas de peaux pourries ??!

Elle me tend le savon noir et le petit seau d’eau, afin que je lave mon corps tout rouge, brulé à vif… Le temps qu’elle s’occupe d’Harmony qui bien que préparée se retrouve dans le même état de sidération que moi.

Ensuite elle nous emmène dans une autre salle pour nous détendre… Une salle sombre, avec les mêmes murs, le même sol, les mêmes femmes nues, identique à la salle précédente mais congelée…Si si ! Ou bien température fraiche. Mais avec nos corps brulés on n’a pas dû avoir les mêmes sensations…

On est sorties propres ça c’est sûr, mais défaites, lessives, essorées ! Malika a eu raison de nous, de nos certitudes, de notre bonne volonté, et même de notre curiosité. Nous nous sommes effondrées de suite en arrivant…

A notre réveil nous avions un défilé de plats tous plus succulents les uns que les autres, sardines grillées, salade méchouïa, boulettes kefta, chekchouka…

Un régal autant visuel que gustatif et une admiration certaine pour un tel talent culinaire !

« Apres le Hammam faut manger les filles ! »

Visite en scooter

Dès le lendemain on était repartis tous les quatre avec Hassan et Abdelaziz qui était en repos ; une visite en scooter, avec la particularité de n’avoir que deux casques, un pour chaque garçon conduisant le scooter afin de nous laisser cheveux aux vents afin que tout le monde puisse savoir que nous étions des touristes et ainsi garantir notre sécurité…. Sécurité routière locale quoi 😊

Et au vu de la conduite générale, et de l’accident que nous avons quand même réussi à avoir, je n’ose imaginer ce que cela aurait pu être sans….

Direction le Jardin de Majorelle, jardin botanique luxuriant au nom de son créateur le peintre français Jacques Majorelle, véritable havre de paix au bleu si célèbrement envoutant… Oasis féérique de Marrakech dans laquelle il fait bon flâner le temps d’une pause presque hors du temps.

On enchaine avec une balade en chameau dans la palmeraie, tellement touristique d’accord mais qui va au Maroc sans monter sur un chameau ?!

On fait un détour pour aller chez les parents de Hassan parce que sa mère l’a appelé mais qu’il n’a pas bien compris ce qu’elle voulait au téléphone. Elle nous accueille au pas de la porte la main sur sa bouche et s’excuse parce qu’elle a perdu toutes ses dents…

Elle nous invite quand même à entrer et nous sert un thé à la menthe le temps qu’elle discute avec son fils dans la cuisine. En repartant elle nous regarde partir en scooter et nous salue de loin en nous faisant un grand sourire…. Oubliant un instant que toutes ses dents étaient vraiment tombées pendant la nuit…

Nous finissons cette sortie par la Ménara….

Immense oliveraie d’une centaine d’hectares où les amoureux aiment se retrouver, entourant un énorme lac dans lequel s’y reflète un palais Saadien l’ensemble situé sous la protection des montagnes se dessinant à l’horizon.

L’ambiance est paisible, sereine… Une fin de circuit idéale

De retour au Ryad, Malika a fait grève de cuisine et a laissé les hommes préparer le repas, non sans gêne pour eux, pendant que nous étions mortes de fatigue clairement… 😊

Abdelaziz a voulu nous montrer ses autres talents cachés en nous proposant un massage… On était évidemment très mal à l’aise à cette idée.

Il nous a pris la main chacune notre tour et a pincé le creux situé entre le pouce et l’index en silence et concentré pendant plusieurs secondes, pour finalement nous annoncer que Nyny avait mal au dos (ce qui était effectivement dû à sa posture debout constante pour son travail de serveuse en restauration) et que moi j’avais un mal aux pieds.

Le mec en touchant ma main a su que j’avais des tendinites sous les 2 plantes de pieds (ouais je sais ça fait vraiment problème de vieille et ça me pourrit la vie depuis des années, et ça ne part pas ni avec le kiné, les semelles, le magnétiseur, et toutes les solutions possibles et inimaginables que j’ai testées !! Rien à y faire, que dalle, walou, nada !).

Il nous a garanti qu’il pouvait nous enlever ça… Et je dois bien avouer qu’à ce moment-là, malgré l’étonnement de la situation, et la confiance qu’on avait tout de même acquise ces derniers jours, on ne s’est pas senties à l’aise du tout du tout ! On a évidement mal pensé et on s’est dit que tout ceci depuis le début n’était que dans ce but… (et en écrivant tout ça je me dis qu’on se prenait quand même pour Beyonce, sérieux !!)

Puis, comme il refusait de faire « ses massages » ailleurs que dans la pièce publique, à savoir sous les yeux de Malika, on s’est dit qu’on ne risquait rien…

Et ce fut assez étrange car il a commencé par me masser le bras en partant du coude et en tirant vers le pouce, « pour évacuer le mal », avec un bruit d’aspiration… Il a ensuite fait la même chose en partant des mollets et en tirant vers l’orteil toujours pour « chasser le mal » … J’avais un peu l’impression d’être possédée quand même !

Croyez-le ou pas, je n’ai plus eu mal dès le lendemain et pendant plus de 2 ans…

Abdelaziz et ses plantes magiques, ses connaissances surprenantes et son pouvoir de guérison visiblement !

La Vallée d’Ourika

Le lendemain nous continuions notre périple à la vallée d’Ourika.

Nous avions vu sur la brochure touristique que la randonnée était organisée un mercredi alors que le jeudi il y avait le marché berbère.

Nous avons donc décidé de faire cette randonnée le jour du marché, afin de pouvoir les visiter les deux. Sachant que depuis le début de notre séjour toutes les personnes nous accostant, et Dieu sait qu’il y en a eu un très grand nombre, nous ont fait cette réflexion quand on leur annonçait que nous étions de Saint-Malo.

« Ahhh Bretonne ! Indépendants !! Comme les berbères !! » Et nous rétorquions, pas peu fières « Ouiii voila !! C’est nous les bretons ! »

On était donc impatientes de voir nos comparses berbères et on trouvait vraiment stupide l’organisation touristique de ne pas prévoir la visite de la vallée d’Ourika le jour du marché.

On ne comprenait d’ailleurs pas non plus pourquoi les garçons étaient réticents à l’idée d’y aller, eux qui semblaient tellement enjoués pour toute activité.

On ne comprenait pas non plus pourquoi ils ont insisté pour nous signaler que le poste de police était juste-là à l’entrée du village…

Et puis on a vu… Les légumes, rabougris, posés à même la terre, tout proches des chiens faisant leurs besoins, baignant presque dans l’eau savonneuse dégoulinant de la personne se faisant raser juste à côté, des morceaux de viandes, fraichement découpés, juste devant des brebis bêlantes, et posés sur des nattes d’osier envahies par les mouches.

On a senti les regards en coin médisants, on a vu la noirceur de leurs yeux dirigés vers nous, on entendait les messes basses à notre passage, on avançait malgré tout timidement, en essayant de ne surtout pas laisser paraitre notre dégout, notre malaise dans ce monde auquel on ne s’attendait pas, dans cette misère à laquelle on n’était pas préparé. On avançait timidement dans cet endroit inhospitalier qui ne voulait pas qu’on soit là.

On a entendu le ton mauvais que certains d’entre eux utilisaient pour nous parler directement, en se dirigeant droit sur nous. Et bien que les garçons se mettaient devant nous comme pour nous cacher et se prendre en première ligne l’agressivité afin que nous en soyons épargnées surement, bien que nous essayions de garder la face, nous sentions que nous étions les bêtes de foire, que quelque chose n’allait pas, bien au-delà du fait que nous étions des touristes…

Abdelaziz ne savait subitement plus parler aucune langue, et surtout pas la sienne, quand on lui demandait de traduire ce que les gens nous disaient.

« Je n’ai pas bien compris… Je ne sais pas, j’ai pas entendu… Le berbère c’est différent tu sais je ne comprends pas bien… »

 Et quand les gens venaient tellement proches que nous pouvions sentir leur haleine, qui, pardon, mais avait réussi à faire fuir la plupart de leurs dents !

« Il a dit que vous êtes jolies… Mais la faut qu’on y aille les filles ! D’accord ? » Mwè…

Nous voilà donc au fond d’un car bondé, assises sur les genoux l’une de l’autre, par 40 degrés, derrière une femme tenant une poule sur ses genoux, prises en sandwiche entre Abdel-Aziz assis sur le siège à coté et une vitre qui ne s’ouvre pas ! Cachées derrière Hassan resté de debout, tentant de nous masquer l’ensemble du car tourné vers nous à observer le moindre de nos gestes…

La brochure 1 – les filles 0 !

La route fut longue. Et plus personnes ne nous a repris à acquiescer lors d’une comparaison entre la bretagne et les berbères !

Une fois arrivé à la vallée d’Ourika nous avons marché pendant des heures, longeant la rivière, escaladant les montagnes, pour parcourir les 7 cascades, découvrant ses petits villages colorés dispersés, perchés dans les montagnes.

On est monté au plus haut, au plus proche de la cascade. On a observé les femmes lavant leur linge dans le fleuve, on a traversé les rives sur des ponts fragiles en bambous quand il y en avait ou en sautant de pierre en pierre. On a été émerveillées par ces « cafés » avec des nattes de toutes les couleurs pour nous accueillir, nichés dans les montagnes le long de la rive ou en bord de cascade. Une escapade fraicheur inoubliable.

Shopping

Demain avant dernier jour… Et qui dit avant dernier jour, dit shoppiiing !

Sauf que les garçons avaient leur propre conception et n’ont pas voulu nous laisser faire.

Hors de question pour eux que nous payions le prix des touristes. Nous nous sommes donc retrouvées cachées au fond d’un stand de souk d’un de leurs amis, à boire du thé, écouter de la musique et passer commande pour ce que nous voulions.

Les regardant ainsi défiler pendant des heures pour nous ramener un service de thé chacun, un miroir, des épices, babouches et autres souvenirs en tout genre. Nous étions les Pretty Women de Ouarzazate lool

Et on validait ou non leur trouvaille, on choisissait entre deux, chaque fois qu’ils nous rapportaient notre commande lol Interdiction formelle pour nous de sortir… Les clandettes du souk lol avec leur ami, mort de rire de la situation, qui avait ordre de ne dévoiler notre présence à personne, de peur que le subterfuge ne se sache sans que nous ayons acheté tout ce que nous voulions.

A la fin de la journée et après avoir montré nos trésors à Malika, nous avions voulu retourner à l’hôtel pour tout y déposer et commencer à préparer nos valises.

Malika nous annonçait qu’elle n’avait jamais été dans un de ces hôtels. Ni une ni deux nous l’embarquons avec nous pour cette épopée qui avait l’air de vraiment l’exciter. Elle était émerveillée devant l’entrée de l’hôtel et osait à peine passer la porte.

Le gardien est venu nous ouvrir ; tout du moins c’est ce que nous pensions. Car il referma la porte derrière nous et ressorti avec Malika qui évidemment refusait de nous traduire et nous a simplement dit qu’elle préférait finalement nous attendre devant.

Harmony s’est alors mis dans une colère pas possible, se dirigeant vers le comptoir et criant au gardien que Malika allait venir avec nous dans notre chambre. Ce dernier a bien tenté de lui expliquer pour la calmer que les marocains et marocaines n’avaient pas le droit de venir dans l’hôtel déranger les touristes…Mais ça ne l’a pas calmée du tout, bien au contraire…

« Malika est notre invitée ! Elle ne dérange absolument personne ! Alors vous allez me faire le plaisir de lui ouvrir la porte ! »

Ce qu’il exécuta, non pas convaincu, mais surtout gêné par le scandale sonore. Elle attrapa Malika par la main, remercia le gardien et pesta contre lui tout le long du couloir.

« On n’a pas dormi ici de tout le séjour, ils n’ont pas dû faire une seule fois notre chambre ! On leur demande rien du tout ! Malika elle nous accueille comme des princesses et lui il va nous mettre la honte comme ça ! Et lui il lui parle comme ça ! Non mais on est où là ?! La honte ! La honte ! »

Malika n’a pas osé lever la tête de tout le couloir. Elle a relevé les yeux seulement une fois à l’intérieur de la chambre, sourire jusqu’aux oreilles, inspectant les moindres détails, la salle de bain, les échantillons de douches, la vue sur la piscine, la télé, osant difficilement s’assoir sur le bord du lit.

« Comment ? Tu nous as frottées les seins à l’air à J+2 et là tu fais ta timide pour poser tes fesses sur le lit ?! »

Elle éclate de rire et décide de nous écouter. Elle nous observe ranger nos affaires en nous posant des tonnes de question sur la France et où on habite, quel temps il fait ? ce qu’on fait de nos journées ? Si un jour elle pourra venir nous voir ? … Le voilà notre instant girly finalement…

En quittant l’hôtel, le gardien s’est précipité pour nous ouvrir la porte et Malika est sortie fièrement en le remerciant droit dans les yeux…

Essaouira

Last Day!

Abdelaziz a tenu à prendre sa journée pour nous accompagner à Essaouira, ville balnéaire qui sur ses conseils se devait d’être vue avant de partir.

4 heures de car quand même, départ à l’aube mais peu importe cela serait surement une des plus belles journées pour finir ce voyage en beauté. On termine notre nuit tant bien que mal dans le car. Et quelle fut notre surprise en descendant ?! « On la connait cette ville ! Si si c’est chez nous ! C’est Saint Malo ! Je vous jure les gars c’est chez nous ! »

Bon vos remparts à vous sont blancs, vos boucheries à l’air libre avec les carcasses suspendues dehors, et vous vendez des sardines grillées et des tapis colorés ! Nous les remparts sont en granit gris et on vend des crêpes et des bols avec des prénoms bretons dessus, mais c’est la même ville, les mêmes ruelles, les mêmes mouettes, la même mer émeraude qui s’éclate sur les mêmes rochers !

Ya même la même plage du sillon avec les thermes marins ! Un choc !

Abelaziz nous raconte alors que c’est un élève de Vauban, qui a conçu les remparts d’Essaouira ; le même Vauban qui avait conçu l’architecture des remparts de Saint Malo (Ah ben je confirme il a triché le gars !)

4 heures de route de notre dernier jour pour en fait rentrer chez nous en avance ?!

On a peine eu le temps de se promener une heure que deux hommes en blouson en cuir noir et lunettes Ray ban (si si ça m’a choquée ! Le stéréotype du flic ripou en civil des années 90) ont accosté Hassan.

Plusieurs fois nous avions remarqué que Hassan se faisait accoster par des hommes à Marrakech mais nous avions toujours pensé que c’était des connaissances, il partait un peu plus loin et revenait quelques minutes plus tard.

Cette fois-ci il ne revenait pas… Et la conversation avait l’air de mal tourner. On les voit partir au loin agrippés par les deux hommes sans trop comprendre. Nous les suivons jusqu’à la sortie des remparts bien qu’un des deux hommes nous ait dit de rester ici.

Hassan nous informe qu’il doit aller au poste de police avec Abdel Aziz, qu’on pouvait finir notre journée et qu’ils nous rejoindraient après. « Quoi ???!!  Non mais hors de question ! En plus on la connait ta ville on te dit ! »

Nous voilà donc tous les quatre au poste de police. Les garçons dans une salle et nous dans une autre, assises pendant des heures sans que personne ne daigne nous expliquer quoi que ce soit !

*On entend leur conversation à distance sans rien comprendre évidement. Les policiers entrent parfois, et discutent entre eux en arabe sans que rien ne nous soit traduit…

« – Non mais qu’est-ce qu’on fout là !! Non mais Harmo sérieux. Personne ne sait qu’on est là en plus ! On fait vraiment de la merde je te jure ! Tu as vu Midnight Express ?? Ça se trouve c’est des gros trafiquants et nous on est là wouah super la balade dans la ville qu’on connait déjà !!

– Chut. Arrête de parler parce que, eux, peuvent très bien comprendre ce qu’on dit… »

Peut-être deux heures plus tard Starsky revient et nous demande en français (ah ben quand même !) si on connait les garçons avec qui on est ?

« Bien sûr !

– Ils ne vous ont pas demandé d’argent ?

– Non pas du tout !

-Vous les connaissiez d’avant ? Ils sont déjà venus en France chez vous ? »

Petit « oui oui » mais oui oui quand même…

– Non parce qu’ici beaucoup se font passer pour des guides et c’est interdit ! Ils n’ont pas le droit de se balader avec des touristes !

– Quoi ? non mais c’est n’importe quoi ! On les connait tres bien ! On est en vacances chez eux ! Ils ne sont pas de faux guides ! Et on a le droit de se balader avec nos amis quand même !!! »

On a dû mettre tout ça par écrit en rédigeant une attestation solennelle d’amitié de plus d’un an… Improbable !

Une fois tous sortis Hassan nous a expliqué qu’au Maroc en effet il est interdit pour les marocains de se promener avec des touristes. Et que donc l’attestation permet de justifier d’une réelle amitié et pas d’une escroquerie. Qu’à Marrakech il a toujours réussi à esquiver le poste de police en donnant des bakchichs aux policiers ; même si c’était le même policier qui l’accostait plusieurs fois par semaine voire par jour et qui savait donc très bien que nous étions toujours les mêmes personnes pour lesquelles il avait déjà perçu sa « compensation » financière… Ce fut notre dernière journée… Effectivement mémorable ! Mais pas comme nous l’avions imaginée !

Le lendemain, jour des au-revoir. Et je ne sais pas si c’est à cause de la journée au commissariat ou la fatigue mais nous étions, en plus d’être tristes, très mal à l’aise à l’idée de partir comme ça, et commencions à nous demander si peut-être ils avaient fait ça comme guides touristiques, et que nous devrions peut-être les rémunérer pour le temps qu’ils nous ont accordé et les découvertes qu’ils nous avaient partagées…

 Enfin bref nous avons osé leur donner de l’argent au moment de les remercier…

Quelle honte ! Ils se sont offusqués ! Et ont refusé catégoriquement ! Ils pensaient qu’on était amis ! Quelle honte ! Quelle honte !

Et quelle tristesse ! De partir ! On aura passé des vacances mémorables et ce uniquement grâce à eux trois… Grace à leur rencontre improbable.

Ils nous ont laissé leur contact (qui à l’époque se résumait en un numéro de stand de souk et un numéro de fixe du Ryad…) et nous ont promis de venir nous voir un jour…

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Commentaires
Belle mère et alors ?
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